La question de savoir si les "études de genre" sont ou ne sont pas "scientifiques" est une des question qui mène presque obligatoirement à une polémique. Le fait que le sexe ne soit pas uniquement un donné "génétique", mais aussi un "construit social", semble poser problème. Et qu'on puisse en avoir une approche "scientifique" (c'est-à-dire objectivante) encore plus. Pourtant, la dernière invention marketing de bic (le stylo "pour femme") montre que la question est à la fois plus compliquée et plus simple qu'elle n'en a l'air.
Le marketing genré fait des ravages : stylo pour dames, ordinateurs de même (forcément rose !), sans oublier les indispensables brosses à dent "pour nous les filles" et le téléphone portable "girly". Et cette différence sera justifiée par de douteuses "études scientifiques" qui justifieront une politique commerciale marquée de préjugés. Voilà ainsi que se justifie , le responsable marketing de Bic responsable des fameux stylos : «Aujourd’hui vous trouvez des instruments d’écritures segmentés en fonction de l’âge. Certains sont spécialement adaptés aux enfants. Ces produits font sens car les enfants ont des besoins en écriture différents des adultes (ergonomie particulièrement étudiée pour faciliter la prise en main par exemple). Pour les femmes, c’est exactement la même chose, les femmes disent spontanément qu’elles préfèrent par exemple les instruments d’écriture au corps plus fin.» Passons sur la lourdement significative, en quoi le "rose" (qui est une sorte de "signature" de ce marketing "genré") est il "scientifique" ? Au contraire, tout montre que ce type d'approche est complétement antiscientifique.
On discute au contraire de la scientificité des genders studies. Qui, pour la plupart, adoptent les mêmes normes et les memes critères que l'ensemble des sciences sociales. Mais qui permettent la politisation d'enjeux (par ailleurs déterminant dans notre société), et c'est ça qu'on leur reproche.
Une étude publiée dans le «Journal of marketing Research» a ainsi montré que les publicités genrées contre le cancer du sein (ruban roses, visages de femmes) amoindrissaient la perception qu’avaient les femmes de leur propre vulnérabilité. Le Professeur Sweldens de l’INSEAD l’explique ainsi: «Notre recherche montre que les communications sur le cancer du sein présentant de forts signaux sexués activent une réaction défensive “ça ne peut pas m’arriver” chez les femmes». «Nos résultats vont à l’encontre des convictions répandues dans le secteur de la publicité, a indiqué le Professeur Tavassoli de la London Business School. Les campagnes sur le cancer du sein devraient éviter d’utiliser des signaux liés au genre tels que montrer une femme se couvrant les seins, car elles sont moins efficaces une fois placées dans des contextes médiatiques qui amènent les femmes à réfléchir à leur propre genre.»
quelques réactions sur le site britannique d'Amazon (merci au site "Les mots sont important" pour l'information et la traduction) :
Butch McCassidy n’y va pas par quatre chemins :
« Oh, Mon Dieu. J’avais tout faux. Et j’étais là, pensant que je n’avais pas à m’inquiéter de savoir si mes fournitures de bureau reflétaient suffisamment mon genre. Merci beaucoup, Bic, de pointer mon erreur. Peut-être que Bic pourrait aussi sortir une nouvelle gamme de clés à molette, tournevis, perceuse électrique et ponceuses féminins, roses (ou violets), pour que je puisse faire mon boulot de réparatrice de vélo en arrêtant de me ridiculiser. J’ai de la chance, mes collègues masculins se sont retenus de dire ouvertement tout le mal qu’ils pensaient du fait que j’utilise leurs outils masculins. J’ai tellement honte. Et maintenant me voilà rééduquée et plus consciente de ma place dans la société. Merci encore Bic ! ».
[cependant, ça existe les perceuses roses NDT]
Kitchenwench n’en revenait pas :
« Mon mari m’en a récemment offert une boîte, mais je n’ai aucune idée de ce que je peux faire avec ! Ils sont trop fins pour servir de rouleau à pâtisserie. Je ne peux pas servir la soupe avec. Et la petite pointe fait à peine une entaille quand j’essaie de couper des légumes ! Je ne comprends pas. Si je ne peux pas l’utiliser dans la cuisine, qu’est-ce que je vais bien faire avec ??? ».
Et celle-là :
« Je les ai essayés sur un coup de tête et je dois dire que je n’ai pas vraiment été convaincue. L’applicateur n’est pas du tout pratique, et le tampon en plastique dedans beaucoup trop fin (en plus d’être inconfortable et pas du tout absorbant). Je suis sûre qu’il y a un truc pour s’y faire, mais je ne l’ai pas trouvé. Il y a aussi du bleu qui a tâché mes sous-vêtements, je ne sais pas pourquoi. J’avais vraiment envie de les adopter, mais je retourne aux serviettes. »
[ il est a noter que le sang menstruel est bleu sur les pubs, échappant ainsi au rose pour représenter Lafâme]
Celui-ci resitue la question par rapport aux vrais enjeux.
« Ca nous fait tous rigoler, bien-sûr (une femme qui utilise un stylo – ridicule !), mais cela pourrait avoir de sérieuses implications. C’est quoi l’étape suivante, des femmes qui vont à l’université ? Des stylos pour encourager la lecture dans les classes inférieures ? Le monde moderne est vraiment dingue.
Amazon, j’espère que vous faites bien attention à ne les vendre qu’à des hommes mariés qui les donneront ensuite à leurs femmes. A utiliser sous stricte surveillance et avec un certificat du médecin.
»