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25 août 2010 3 25 /08 /août /2010 12:43
Aborder le sujet des violences faites aux femmes, telles que le viol, l’inceste demeure une initiative très délicate, surtout que l’on constate un manque d’existence de mesures en matière de prévention. Des phénomènes qui ont pris de l’ampleur au cours de ces dernières années. Combien sont-elles ces femmes touchées dans leur honneur ?
 
Les auteurs de violences contre les femmes sont très divers, mais peuvent être regroupés en trois principales catégories, selon la Déclaration des Nations Unies sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes CEDAW (Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes). La famille constitue la première catégorie, où l’on recense les violences liées à la dot, le viol conjugal, les mutilations génitales et autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la femme, la violence non conjugale, et la violence liée à l’exploitation. La deuxième catégorie est la collectivité, espace dans lequel les femmes sont victimes de viol, de sévices sexuels, de harcèlement sexuel et d’intimidation au travail, dans les établissements d’enseignement et ailleurs, de proxénétisme et de prostitution forcée. Enfin, la troisième catégorie, c’est l’Etat, responsable de violences qu’il a directement perpétrées ou qu’il a tolérée ; cette catégorie englobe la violence engendrée par la législation d’un Etat. L’Algérie est touchée par ces trois catégories avec, comme dénominateur commun, l’insuffisance des politiques développées par les autorités publiques pour prévenir ces violences et punir leurs auteurs.
 
A cet effet, dans cette contribution, nous allons parler de certains cas de violences répertoriées dans les catégories deux et trois. Des fléaux tabous et marginalisés, bien qu’il ait des répercussions psychologiques et sociales très importantes, pour les pouvoirs publics et la société ! Malheureusement, il est de ces tabous qui se retournent contre ceux-là même qui refusent d’en parler. Certes, être une victime de viol ou d’incest est une raison sociale qui n’existe pas dans notre culture. Mais les phénomènes existent et ne connaissent pas de fléchissement. Il faut donc regarder la vérité en face, en parler et y trouver de solutions.
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16 août 2010 1 16 /08 /août /2010 12:17
 
  • En décidant de se confier à Mediapart, Pierre Gouet ne raconte pas seulement son histoire, mais aussi celles de centaines, voire de milliers d'enfants qui ont été violés par des religieux pédophiles et/ou obsédés sexuels (lire la première partie de son témoignage ici). L'Église a toujours su que ces criminels (il n'y a pas vraiment d'autre mot) opéraient en son sein, mais elle a toujours cherché à dissimuler leurs actes et à les protéger. En partie par charité chrétienne mal placée, mais surtout par peur d'éclabousser l'institution.

    Aujourd'hui, tout au moins en France, les autorités religieuses ne nient plus en bloc, mais elles cherchent toujours à minorer l'impact des révélations qui se succèdent. Pourtant, tout en se défendant, elles laissent entrevoir une situation qui fait froid dans le dos. Ainsi, dans un entretien au quotidien Sud-Ouest, Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux, explique: «J'ai dû affronter huit situations de prêtres convaincus d'actes de pédophilie envers des adolescents. Je compare ce chiffre avec le nombre de prêtres des trois diocèses – 850.» Ce qui représente tout de même 1% de la prêtrise.

    Par le biais de son oncle et tuteur, mais aussi de son frère prêtre, Pierre Gouet a entrevu le fonctionnement de la machine de l'intérieur. Les dissimulations, les compromissions, les réseaux, les liens avec l'État. C'est une histoire qui mêle un prêtre pédophile dans la Sarthe, mais aussi Paul Touvier, des ministres et des chefs d'État, et qui s'étend de la Seconde Guerre mondiale à la France pompidolienne.

     

    Retour à la vie

    « Quand j'ai quitté la Psallette en 1959, j'étais vraiment content de partir. Mon oncle Julien Gouet m'a poussé à poursuivre mes études au petit séminaire, mais cela n'a pas été très efficace. J'étais trop perturbé. De 1960 à 66, cela a été terrible.

     

     

    Pierre Gouet, le 10 juin 2010
    Pierre Gouet, le 10 juin 2010© Thomas Cantaloube

     

     

    «C'est le monde du travail qui m'a fait surmonter cela. Quand je suis parti du séminaire, ma mère m'a dit: “Pas question que tu restes à la ferme avec moi, il faut que tu travailles.” Alors, j'ai fait des petits boulots. Comme ça ne marchait pas très bien, qu'une de mes sœurs travaillait à Paris, et que mon oncle avait été nommé secrétaire général de l'épiscopat en 1960, la famille a suivi le courant aspirant vers Paris. Je crois que c'est 1968 qui m'a guéri de mes dysfonctionnements moraux.

    « Il y avait un besoin de changement. 1968 m'a fait assumer complètement ma différence. J'avais besoin d'être un citoyen actif. J'étais à Air Inter, j'ai fait la grève pendant un mois et demi, ensuite j'ai participé à la création du syndicat autonome puis de la CFDT. Quand on est partie prenante dans une démarche sociale, ça donne plus de rigueur personnelle.

    « J'ai eu quatre compagnons. Il y en a trois qui sont morts. L'un m'a quitté, et est mort. L'autre s'est marié, puis s'est suicidé. Le troisième est mort du sida. J'ai rebondi, et j'ai de nouveau un compagnon. À partir du moment où j'étais en couple, cela me donnait une morale de vie, j'étais fidèle et je désirais me battre pour mes droits. À Air Inter, je n'ai jamais caché mon homosexualité, ni auprès des présidents, des directeurs ou des syndicats.»

     

    Prêtres pédophiles

    « Je n'ai jamais reparlé à mon oncle du père Blin. Quand j'ai quitté le séminaire, il m'a dit: “Je savais bien que tu branlais dans le manche, que ça n'allait pas.” C'était une discussion sans trop de détail. Il voulait éviter de revenir sur une période douloureuse. Les relations avec mon oncle ont toujours été un peu bizarres. C'étaient des relations d'autorité. Quand il sentait des problèmes, il ne les abordait pas de face. Il était bien de la tendance des prêtres de cette époque-là: les fautes, cela pouvait se pardonner.

     

  • « Quand mon oncle était avec Villot, à l'archevêché de Paris, ils ont fait nommer un prêtre, qui s'est avéré pédophile, dans ma petite paroisse de campagne. Il n'a pas fait long feu, parce que les gens se sont plaints. Il aimait plutôt les petites filles. Il n'y a pas eu de procès, l'affaire a été étouffée. Ça m'a paru curieux de la part de mon oncle. Mais avec son sens inné du pardon, il pouvait faire n'importe quoi. Les catholiques s'autorisent à faire des choses qui sont contraires à la loi. Il savait que ce prêtre était pédophile. Il l'a nommé histoire de rendre service à son ami cardinal, en pensant qu'il se calmerait dans une paroisse de campagne. Le prêtre a été évacué...

    « Mon frère, lui, était prêtre dans une paroisse du nord de la Sarthe. Dans une de ses affectations, il a remplacé un prêtre, à Malicorne, pas très loin de Sablé, qui s'occupait beaucoup des petits scouts. Il fallait toujours tout étouffer. Les prêtres pédophiles, on les fait tourner. Même mon frère est terrible pour cela. Quand on lui parle, c'est la chape de plomb qui tombe. Dans les réunions de famille ou en petit comité, parfois, il parlait de ces histoires de prêtres pédophiles. Il disait: “Le prêtre untel, il s'occupait beaucoup des petits scouts et il y a eu des problèmes avec les familles de Malicorne. Moi je ne tiens pas à avoir la même chose.” Alors il a fermé la petite alcôve où les scouts montaient avec le père curé. Il y avait une alcôve en hauteur, où il fallait monter par une petite corde que le prêtre tirait. C'était inaccessible. Il pouvait faire n'importe quoi là-haut, personne ne s'en rendait compte. C'est un peu fou... »


    La grande figure de la vie de Pierre Gouet est son oncle et tuteur Julien Gouet: résistant durant la guerre, puis notable religieux dans la Sarthe et enfin agent de l'ombre entre Église et État, conseiller de De Gaulle et proche de la famille Pompidou. Un homme qui avait autant d'amis en politique que dans les ordres, qui a travaillé avec Roger Etchegaray, Jean-Marie Lustiger ou l'actuel président de la Conférence des évêques de France, André Vingt-Trois. Et qui a hébergé le criminel contre l'humanité, Paul Touvier, chez lui.


    Julien Gouet, à Saint Pierre de Rome en 1962
    Julien Gouet, à Saint Pierre de Rome en 1962© DR
    Mon oncle
    « De 1960 à 1966, mon oncle Julien Gouet était secrétaire de l'épiscopat. Il a négocié avec brio la loi sur l'enseignement privé. Il voulait que cela aboutisse, car il n'aimait pas les libres penseurs et les francs-maçons. Il voulait prendre une revanche sur la loi Combes de séparation de l'Église et de l'État. De Gaulle était un peu réticent, mais comme les catholiques de l'époque étaient un bon vivier d'électeurs pour lui, il n'a pas été trop regardant et il a laissé faire ses ministres. J'ai entendu Jean Foyer (garde des Sceaux de 1962 à 1967) dire à mon oncle: “Vous faites une directive auprès des évêques pour que, dans les paroisses de France, on dise qu'il faut voter pour le Général.”

     

    « Mon oncle était aussi un des conseillers de De Gaulle, mais il ne voulait pas en parler. Il s'occupait des relations entre le général et l'Église. Mais il a été énormément troublé quand Bastien-Thiry a été exécuté. Après, il a cessé d'aller voir de Gaulle. Mais il est resté ami de la famille Pompidou, il a marié son fils Yves, il est intervenu quand il y a eu des ragots sur la vie privée de Madame Pompidou.

    « C'était un gros bosseur, un homme de dossiers, une figure de l'ombre. Ce n'était pas une personne capable d'animer un diocèse, mais un homme d'appareil. Il était brillant, secret, efficace, mais il y avait deux visages en lui. Celui de l'ombre, pas très joyeux, et celui de la réussite, qui n'était quand même pas si mal. Il a logé dans plusieurs hôtels particuliers que possédait l'Église, notamment la maison de Mata Hari, où s'est fait le mariage de ma sœur. C'était assez cocasse. Il y a eu l'hôtel de la rue du Bac, la résidence en face Matignon, 53, rue de Varenne. Quand on fait le tour des biens que possèdent les institutions religieuses dans Paris ou ailleurs, c'est affolant... Il a refusé la nomination d'archevêque de Bordeaux. Il aurait pu être cardinal. Mais la charge d'un diocèse était quelque chose qu'il ne voulait pas renouveler. Il avait un ami, qui lui a succédé, le cardinal Etchegaray, qui était d'une autre trempe. Il était d'une simplicité..., c'était l'antithèse de mon oncle.

  • «L'épiscopat français en a beaucoup voulu à mon oncle pour l'affaire Touvier»

    « Il a fini par quitter le secrétariat de l'épiscopat car il ne s'entendait pas trop avec Lustiger, qui avait des auxiliaires comme Mgr Vingt-Trois qui lui savonnaient la planche. Lustiger voulait davantage de séparation avec le pouvoir politique, alors que mon oncle était vraiment immergé dans le pouvoir. Il a été sacré évêque, puis nommé directeur de l'œuvre pontificale de la sainte enfance. Cela consistait à collecter les fonds auprès des gouvernements et des structures d'État, pour financer des maisons pour les enfants. Il a été voir Pinochet et certains dictateurs peu recommandables. À mon avis, sous sa tâche, il y avait une aide à l'Opus Dei qui n'était pas négligeable.

    « Je suis sûr qu'il a eu à connaître un certain nombre de problèmes de pédophilie lorsqu'il était à l'œuvre pontificale de la sainte enfance. Il était au courant de certaines choses, tout en étant essentiellement collecteur d'argent. Lorsqu'il a quitté sa charge, il m'a demandé de l'emmener en voiture avenue Reille, chez les Franciscaines missionnaires de Marie, où il y avait un broyeur. Il m'a dit: “Je me débrouille tout seul”, et il a déchiqueté plein de documents, dossiers et notes. Je pense qu'ils avaient à voir avec certaines affaires de l'épiscopat et de l'œuvre de la sainte enfance, qui était un puits d'argent pour l'Église. »

     

     

    Compromissions

    « L'épiscopat français lui en a beaucoup voulu pour l'affaire Touvier. Il pensait que le repentir et le pardon à Touvier étaient un parcours normal pour un effacement des charges qui pesaient contre lui, en vue d'une réhabilitation. Il l'a accueilli chez lui. C'était sous Pompidou. La résidence où il habitait, rue de Varenne juste à côté de l'Hôtel Matignon, faisait trois étages. Il avait le deuxième, et au troisième, il y avait des chambres et des appartements. Touvier était en haut. Généralement, le samedi ou le dimanche on allait chez lui faire des petites ripailles, car il était assez convivial. Il nous interdisait d'aller là-haut, mais évidemment c'était la première chose que l'on faisait. C'est là qu'on croisait “Monsieur Paul”.

     

     
    Pierre Gouet, le 10 juin 2010© Thomas Cantaloube
    « Pour l'Église, c'était vraiment une faute politique, une imbrication profonde avec le pouvoir. Quand il s'est retiré dans la Sarthe, il était oublié. Pour son sacre, il y avait tous les cardinaux, archevêques et évêques de France. À son enterrement il y en avait à peine dix. Cela montre bien le rejet flagrant. C'est cela qui l'a fait un peu mourir.

     

    « Un jour, j'ai parlé à mon oncle de mon homosexualité. Il connaissait bien Joël Le Theule, député de la Sarthe et ministre sous de Gaulle et Giscard, qui ne cachait pas son homosexualité à mon oncle. D'ailleurs, il a célébré son homélie le jour de son décès. Monsieur Le Theule avait comme adjoint parlementaire Monsieur Fillon. Il lui a servi de mentor. Il y avait, chez certains pasteurs, comme une grandeur d'âme à accepter l'homosexualité, quand on était arrivé à un certain niveau. »

     

    Quelle foi ?

    « Aujourd'hui, je ne peux pas croire dans les balivernes et les contes de fées de la Bible ou du catéchisme. Ce n'est pas possible de raconter des sornettes aux enfants. C'est révoltant que l'Église n'ait pas le courage d'accepter de se remettre en cause.

    « Quant à mon rapport avec la foi, la sainteté républicaine, dont parle Vincent Peillon, me convient très bien. On peut être, quand on est laïque, voisin d'une morale, qui accepte la charité, la solidarité, la justice, le partage... Mon engagement social et syndical m'a beaucoup marqué. C'est ce qui m'a aidé à m'épanouir. C'est ma foi dans l'Homme, dans la justice. C'est une autre foi. Tant pis si je ne crois pas dans un Dieu barbu.

    « L'arrivée de tous ces scandales qui montaient en puissance ces derniers mois m'a profondément remué. Cela m'a torturé et empêché de dormir pendant plus d'une semaine. Puis je me suis dit qu'il n'était pas possible de se taire. Au Mans, j'ai aidé à fonder une association qui s'appelait Homogène. On faisait des permanences et l'on était confrontés à des gens qui avaient subi la même chose. L'Église française bétonne complètement. Ce que me dit, par bribes, mon frère, me prouve qu'il y a encore des prêtres pédophiles, qui sont en activité. »

     

    La première partie du témoignage de Pierre Gouet se trouve ici.

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15 août 2010 7 15 /08 /août /2010 12:12

« Quand mon oncle était avec Villot, à l'archevêché de Paris, ils ont fait nommer un prêtre, qui s'est avéré pédophile, dans ma petite paroisse de campagne. Il n'a pas fait long feu, parce que les gens se sont plaints. Il aimait plutôt les petites filles. Il n'y a pas eu de procès, l'affaire a été étouffée. Ça m'a paru curieux de la part de mon oncle. Mais avec son sens inné du pardon, il pouvait faire n'importe quoi. Les catholiques s'autorisent à faire des choses qui sont contraires à la loi. Il savait que ce prêtre était pédophile. Il l'a nommé histoire de rendre service à son ami cardinal, en pensant qu'il se calmerait dans une paroisse de campagne. Le prêtre a été évacué...

« Mon frère, lui, était prêtre dans une paroisse du nord de la Sarthe. Dans une de ses affectations, il a remplacé un prêtre, à Malicorne, pas très loin de Sablé, qui s'occupait beaucoup des petits scouts. Il fallait toujours tout étouffer. Les prêtres pédophiles, on les fait tourner. Même mon frère est terrible pour cela. Quand on lui parle, c'est la chape de plomb qui tombe. Dans les réunions de famille ou en petit comité, parfois, il parlait de ces histoires de prêtres pédophiles. Il disait: “Le prêtre untel, il s'occupait beaucoup des petits scouts et il y a eu des problèmes avec les familles de Malicorne. Moi je ne tiens pas à avoir la même chose.” Alors il a fermé la petite alcôve où les scouts montaient avec le père curé. Il y avait une alcôve en hauteur, où il fallait monter par une petite corde que le prêtre tirait. C'était inaccessible. Il pouvait faire n'importe quoi là-haut, personne ne s'en rendait compte. C'est un peu fou... »


La grande figure de la vie de Pierre Gouet est son oncle et tuteur Julien Gouet: résistant durant la guerre, puis notable religieux dans la Sarthe et enfin agent de l'ombre entre Église et État, conseiller de De Gaulle et proche de la famille Pompidou. Un homme qui avait autant d'amis en politique que dans les ordres, qui a travaillé avec Roger Etchegaray, Jean-Marie Lustiger ou l'actuel président de la Conférence des évêques de France, André Vingt-Trois. Et qui a hébergé le criminel contre l'humanité, Paul Touvier, chez lui.


Julien Gouet, à Saint Pierre de Rome en 1962
Julien Gouet, à Saint Pierre de Rome en 1962© DR

Mon oncle
« De 1960 à 1966, mon oncle Julien Gouet était secrétaire de l'épiscopat. Il a négocié avec brio la loi sur l'enseignement privé. Il voulait que cela aboutisse, car il n'aimait pas les libres penseurs et les francs-maçons. Il voulait prendre une revanche sur la loi Combes de séparation de l'Église et de l'État. De Gaulle était un peu réticent, mais comme les catholiques de l'époque étaient un bon vivier d'électeurs pour lui, il n'a pas été trop regardant et il a laissé faire ses ministres. J'ai entendu Jean Foyer (garde des Sceaux de 1962 à 1967) dire à mon oncle: “Vous faites une directive auprès des évêques pour que, dans les paroisses de France, on dise qu'il faut voter pour le Général.”

 

« Mon oncle était aussi un des conseillers de De Gaulle, mais il ne voulait pas en parler. Il s'occupait des relations entre le général et l'Église. Mais il a été énormément troublé quand Bastien-Thiry a été exécuté. Après, il a cessé d'aller voir de Gaulle. Mais il est resté ami de la famille Pompidou, il a marié son fils Yves, il est intervenu quand il y a eu des ragots sur la vie privée de Madame Pompidou.

« C'était un gros bosseur, un homme de dossiers, une figure de l'ombre. Ce n'était pas une personne capable d'animer un diocèse, mais un homme d'appareil. Il était brillant, secret, efficace, mais il y avait deux visages en lui. Celui de l'ombre, pas très joyeux, et celui de la réussite, qui n'était quand même pas si mal. Il a logé dans plusieurs hôtels particuliers que possédait l'Église, notamment la maison de Mata Hari, où s'est fait le mariage de ma sœur. C'était assez cocasse. Il y a eu l'hôtel de la rue du Bac, la résidence en face Matignon, 53, rue de Varenne. Quand on fait le tour des biens que possèdent les institutions religieuses dans Paris ou ailleurs, c'est affolant... Il a refusé la nomination d'archevêque de Bordeaux. Il aurait pu être cardinal. Mais la charge d'un diocèse était quelque chose qu'il ne voulait pas renouveler. Il avait un ami, qui lui a succédé, le cardinal Etchegaray, qui était d'une autre trempe. Il était d'une simplicité..., c'était l'antithèse de mon oncle.

 

A suivre ..............

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14 août 2010 6 14 /08 /août /2010 12:37

Financés à prix d’or pour être référencés prioritairement dans les résultats de recherche de Google, par mots clés, comme par exemple "franc-maçon", ces sites de confessions vaseuses, à l’allure de sites persos, sont des faux, et visent plusieurs objectifs :


- très informés, ils décrivent ces organisations de l’intérieur (1), sous un angle détaillé, de manière à convaincre même les membres de ces organisations qui douteraient de leur affiliation : la meilleure façon de mentir n’est-elle pas de se rapprocher le plus possible de la vérité ?

- la guerre totale contre la concurrence façon marketing U.S.A. , tous les moyens sont bons, en commençant par la calomnie et la désinformation. Après les télévangélistes, le prêche numérique...

- renforcer les craintes populaires et peurs ancestrales, insister sur la mise en danger de la famille, pour mieux se placer en directeur de conscience,

- enfin prôner la foi chrétienne et dans la Bible envers et contre tout, bref évangéliser.

Comme toutes les religions, le Christianisme renferme des trésors de sagesse. C’est vraiment dommage que des bureaucraties sectaires transforment ce message d’amour en appel à la peur vindicative, et à la régression de conscience.

Les faits ?

1) Beaucoup d’argent investi dans le référencement.

Lisez ce lien : http://www.luc-deliere.com/
Le compteur du site annonce 2384 visites. Comment se fait-il qu’un site ayant si peu de visites se retrouve dans les 10 premiers résultats de recherche de Google ?

Tapez "franc-maçon" dans la barre de recherche Google et ces deux sites apparaissent en 7 et 8ème position : http://journalchretien.net/6616-je-suis-sorti-de-la-franc ; http://www.cailletm.com/

Est-il permis de douter qu’il s’agisse uniquement du fait de leur très grande fréquentation ?

2) Même origine rédactionnelle et contenu pour l’ensemble des textes.

La Rose-Croix (AMORC), ordre traditionnel et initiatique, organisation déclarée non sectaire, comme la franc-maçonnerie, par les instances républicaines françaises (2), est également visée (en 6ème position dans une recherche par mot-clé "amorc" dans Google) :

http://fabienne.guerrero.free.fr/quitte%20rose%20croix.htm

Remontez à la racine (domaine) du site : http://fabienne.guerrero.free.fr/

Vous tombez sur le titre "Site d’Evangélisation..." catholique. Ponctué de plusieurs liens vers des livres : Jésus m’a sauvée du New Age, du Spiritisme, de la Voyance, de la croyance en la réincarnation, etc. Avec la garantie suivante : LIVRETS AYANT OBTENU L’IMPRIMATUR ET LE NIHIL OBSTAT DE L’ARCHEVECHE DE PARIS - SERVICE DE L’IMPRIMATUR - lettre jointe et signature à l’appui : http://fabienne.guerrero.free.fr/CLARIFICATIONINDEX.htm

Les textes sont traduits dans 14 langues et circulent dans tous les pays du monde.

Savez-vous que le siège de l’Opus Dei, secte catholique intégriste qui avait été lavée de tout soupçon de sectarisme, dans le premier rapport parlementaire français contre les sectes, a son siège mondial à New York ?

opus_deijpg-73ae-89f3a.jpg

 

 

 Dans cette planche (exposé) d’un franc-maçon sur cette organisation et ses ramifications vous trouverez cités, page 27, Lilianne Bettencourt, page 52, le cardinal Joseph Ratzinger, entre autres : http://www.scribd.com/doc/29680809/La-Prelature-de-L-Opus-Dei

Mais l’enquête ne fait que commencer...

(1) ce qui prouve une infiltration, ou une recherche coûteuse et approfondie.

(2) http://www.rose-croix.org/questions/attestations_1.html ; voir aussi http://www.prevensectes.com/amorc.htm

 

Source AgoraVox

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13 août 2010 5 13 /08 /août /2010 12:35
 

Il faut avoir la chance d’être étroitement associé à certains évènements pour se rendre compte à quel point certains journalistes déforment les faits et par là même désinforment l’opinion.

 

Deux exemples puisés dans des dossiers qui me sont familiers : le procès des dirigeants Khmers Rouges et la tension entre le Cambodge et la Thaïlande à propos de leur frontière commune.

 

Commençons par le procès des dirigeants Khmers Rouges Les survivants de la barbarie communiste représentent aujourd’hui un peu moins d’un quart d’une population très jeune. L’intérêt fut lent à se manifester. Pour deux raisons au moins. Première explication, les procès interviennent plus de trente ans après les faits. Parce que pendant dix ans à partir de 1979, la communauté internationale (y compris la France et la Belgique) a fait le choix de considérer que les représentants légitimes du peuple cambodgien étaient ses bourreaux. Il a fallu encore une décennie avant que la pacification intervienne, l’ONU ayant échoué dans cette mission. Enfin, compte tenu des lenteurs onusiennes, six ans ont été nécessaires pour définir un tribunal qui tienne compte à la fois de la souveraineté du Cambodge et de la nécessité de respecter les critères internationaux du droit pénal. Trente longues années tout au long desquelles, les Cambodgiens n’ont pas eu d’autre choix que de s’accommoder d’un passé lourd de souffrances morales et physiques. Deuxième explication, la vie. Et la force qu’elle donne de continuer, même quand on a été confronté au pire du pire. Avec pour seul remède le silence. Un silence de la même nature que celui observé lors du retour des survivants des camps nazis. Le silence de ceux qui ont survécu à Pol Pot et ses complices n’est en rien différent du silence de ceux qui sont revenus de Buchenwald, de Ravensbrück ou d’Auschwitz.

 

 

 Mais au fur et à mesure que les gens ont appris l’existence du tribunal et le travail de recherche de la vérité qui s’y opère, l’intérêt n’a pas cessé de grandir. Grâce à l’inlassable travail du Centre de Documentation du Cambodge (une institution privée créée à l’initiative de l’université de Yale  -  www.dccam.org ) et du service des affaires publiques du tribunal, les survivants sortent peu à peu du silence dans lequel, pour se prémunir, ils se sont corsetés si longtemps.

 

 

Plus de trente mille personnes ont renoncé à une journée de travail dans les rizières, parfois lointaines, pour assister à une audience du tribunal. Ils sont des milliers à participer aux séances d’information organisées dans tout le pays. Alors qu’un peu moins de cent personnes s’étaient constituées parties civiles pour le premier procès (une grande première en droit pénal international), le tribunal a enregistré à ce jour quatre mille constitutions de partie civile pour le deuxième procès.

 

 

Et pourtant, il se trouve quelqu’un, au Cambodge, qui vient de déclarer : « Tout le monde se moque du procès ! ». Parce qu’il est Français, parce qu’il est prêtre, parce qu’il a vécu au Cambodge avant 1975 et qu’il est revenu en 1992 (on ne l’a pas vu pendant les années d’isolement de 1979 à 1991), il représente aux yeux de l’immense majorité des journalistes français de passage LA source incontournable et incontestable. Et c’est ainsi qu’on trouve, dans la plupart (pas dans tous, heureusement) des articles consacrés au Cambodge par la presse française des développements sur l’absence d’intérêt de la population cambodgienne pour ces procès. Or, la France, avec d’autres pays, participe au financement du tribunal. Et les contribuables français ont le droit à une information honnête sur le travail effectué par cette institution (http://www.eccc.gov.kh/french/ ). Déformation des faits ; désinformation des lecteurs.

 

 

Autre exemple, l’affaire du Temple de Preah Vihear et de la frontière qui sépare Cambodge et Thaïlande. C’est un de mes dossiers. Je suis donc particulièrement attentif aux développements quotidiens de cette affaire. Surtout que la Thaïlande, en crise profonde depuis le coup d’Etat militaire de 2006, remet en question le tracé de la frontière à cet endroit (comme à d’autres d’ailleurs). Or, cette frontière est fixée par un traité vieux d’un siècle, traité confirmé à de multiples reprises par des actes de droit entre les deux pays. Frontière reconnue par la Cour Internationale de Justice en 1962 pour justifier de l’appartenance du temple au Cambodge.

 

 

Depuis une semaine, le Comité du Patrimoine Mondial de l’UNESCO est en session, au Brésil. Il doit examiner un plan d’aménagement du site du temple qui a été inscrit, il y a deux ans, sur la lite du patrimoine mondial de l’humanité. La Thaïlande conteste cette inscription et donc ce plan. Elle demande qu’il soit retiré de l’ordre du jour. Le Premier Ministre thaïlandais menace même de retirer son pays du Comité s’il n’est pas fait droit à cette exigence. Jeudi dernier, en soirée, me parvient la nouvelle que l’examen du plan cambodgien est reporté à une autre session du Comité, l’an prochain. « Défaite cambodgienne », victoire thaïlandaise », la presse thaïlandaise se déchaîne. Suivie par certains titres occidentaux ainsi que par Voice of America et par Radio Free Asia, toujours à l’affut d’informations susceptibles de mettre à mal le gouvernement cambodgien. Je passe le week end à consulter tous les titres accessibles pour en arriver à une conclusion personnelle : alors que le Cambodge dispose d’un dossier juridiquement solide, il n’a pas convaincu le Comité.

 

 

Ce lundi, retour au bureau. Je reçois des nouvelles de la délégation cambodgienne au Brésil et j’apprends qu’un document a été approuvé, signé par les ministres de Thaïlande et du Cambodge présents à la réunion. Surprise ! Ce document, qui m’est transmis, prend acte de l’inscription du temple, se réjouit des travaux accomplis par le Cambodge en vue des obligations qui lui incombent suite à cette inscription, prend acte du plan d’aménagement et décide de poursuivre la gestion du dossier à sa prochaine session. Ainsi donc, les faits sont radicalement à l’opposé de ce que la presse a relaté. La Thaïlande, du moins sur papier, reconnaît l’inscription du temple et ne s’oppose pas aux travaux à venir. Déformation des faits ; désinformation des lecteurs.

 

 

Je me dis une chose : s’il en est ainsi pour deux dossiers qui me sont familiers, qu’en est-il des autres ? Qu’en est-il du lecteur ou de l’auditeur qui n’est pas un peu averti des sujets qui font l’actualité ? Parce que je sais bien que chez nous, c’est pareil. Ce n’est plus de l’info. C’est de l’intox. Alors, que vive Médiapart, que vive Arrêt sur images, que vivent Le Monde Diplomatique et Le canard enchainé. Que vive une presse indépendante de toute pression politique, économique et financière. Cela dépend aussi de chacun d’entre nous.

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13 août 2010 5 13 /08 /août /2010 11:55
«On nous a dit que le père était parti pour raisons de santé»

« Pendant une période de deux ou trois mois, j'ai eu un délire mystique. J'allais pleurer dans la cathédrale, m'abîmant en prières et repentirs devant les saintes statues que j'avais tant vénérées. Je pleurais dans mon lit... À partir de là, je suis devenu complètement perturbé et je me suis mis à faire plein de sottises de gamin. Je ne travaillais plus, j'étais dans un autre monde. Je faisais des rêves complètement fous. Je crois que c'est là que s'est éveillée ma différence, mon homosexualité. Il y a un glissement qui s'est fait. Avec mes camarades de classe, je ne me privais pas. Mais je ne me confessais plus. Un jour, on a voulu me forcer à me confesser et j'ai avalé une grosse pièce de cinq francs. Cela m'a conduit à la clinique Saint-Cosme pour être opéré de l'appendicite.

« Mon oncle s'apercevait d'un changement très profond chez moi. En 1953, il a effectué un voyage à Rome, pour la consécration du cardinal Grente, un personnage haut en couleur, membre de l'Académie française, un peu précieux sur les bords. Au retour de son voyage, mon oncle m'a fait parler un petit peu. J'étais complètement malade de ce qui se passait et j'ai fini par craquer.

« Je lui ai tout raconté. Mon oncle est devenu fou. Il est sorti de son bureau et il m'a dit: “Tu retournes à la psallette et tu restes tranquille”. Le lendemain, le père Blin n'était plus là. Tous les gamins se posaient des questions. On nous a dit que le père Blin était parti pour raisons de santé. Cela nous a bien fait rire qu'il soit victime de problèmes de santé du jour au lendemain, car il était vaillant et costaud. »

 

 

Pierre Gouet, Mme Gouet, Jean Gouet et Bernard Gouet au Mans en 1957
Pierre Gouet, Mme Gouet, Jean Gouet et Bernard Gouet au Mans en 1957© DR

 

 

Omerta

« Je ne sais pas si les autres professeurs avaient connaissance de cela, mais ils se sont tus. En 1953, le père Blin était devenu le supérieur de la psallette, et en plus il avait une charge honorifique : il était maître de cérémonie du cardinal. C'était quelqu'un que tout le monde craignait. Après, j'ai su par le maître d'hôtel du cardinal, et d'autres personnes, qu'il avait des mœurs que l'on disait légères et que cela était connu.

« J'ai perdu sa trace. J'ai demandé à mon frère ce qu'il était devenu, mais il n'a jamais voulu me le dire. J'ai appris très récemment qu'après son renvoi de la psallette du Mans, il avait été envoyé à l'abbaye de Clairvaux, en Champagne-Ardenne. Et puis qu'il était revenu dans la Sarthe, comme auxiliaire à La Ferté-Bernard en 1966. Il en reparti presque aussitôt pour s'éteindre en 1967.

« Je savais que d'autres élèves étaient concernés parce que j'en parlais avec eux à l'époque. J'ai demandé à la psallette les archives et le nom des élèves, mais je n'ai jamais pu les avoir. On a refusé de me les donner. Avec les quelques noms qui me revenaient en mémoire, j'ai cherché sur internet et Facebook. J'en ai trouvé, je les ai contactés, mais ils ne m'ont pas répondu. »

 

A suivre .......

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12 août 2010 4 12 /08 /août /2010 11:53

 

·         C'est une histoire qui n'a pas été facile à raconter. Enfouie pendant des années, des décennies, au plus profond de son corps et de ses souvenirs. Il aura fallu que les affaires de pédophilie dans l'Église resurgissent, une fois de plus, au mois de mars 2010, et que Benoît XVI renâcle à les reconnaître et à s'en excuser, pour que Pierre Gouet décide de se confier. Abonné et lecteur fidèle de Mediapart, il a envoyé un email faisant part de son désir de parler, après une semaine de nuits sans sommeil. Pour raconter son histoire, à la fois emblématique et unique. Emblématique, parce que des gamins victimes de violeurs en soutanes, dans les années 1950, il y en a probablement eu des milliers rien qu'en France. Unique, parce que son contexte familial lui a fourni un point d'observation privilégié sur le fonctionnement de l'Église et sur ses connivences avec une partie de la droite française.

Il y a beaucoup de blancs dans l'enregistrement du témoignage de Pierre Gouet. Des hésitations, mais aussi de l'émotion contenue. Une douleur longtemps ravalée. Nous avons choisi de vous présenter son récit, en deux parties, de manière brute et extensive.

Pierre Gouet, le 10 juin 2010© Thomas Cantaloube

 

Origines

« Je suis un fils de paysan originaire de la Sarthe. Mon père a été prisonnier de guerre, déporté, et il est mort des suites de captivité en 1951. J'avais sept ans et demi. Le conseil de tutelle, présidé par mon oncle Julien Gouet, qui était vicaire général du cardinal Grente, a dit qu'il fallait que j'aille en pension. J'ai donc été envoyé à la psallette de la cathédrale du Mans.

« Ma mère était vivante, mère de huit enfants et vivait dans une petite ferme. Pour elle, c'était une certaine libération, même si j'ai su plus tard que c'était très dur pour elle de se voir dépouiller de ses enfants.

« Je suis rentré à la psallette en octobre 1951. C'était très difficile. J'étais un gamin complètement perdu. Mon frère, qui avait dix ans de plus que moi, était séminariste au Grand Séminaire du Mans. Pour la petite histoire, il a été surveillant de François Fillon à Saint-Michel-des-Perrais. Il était très turbulent... J'avais un autre oncle jésuite. Pour mon grand-père, le fait que ses enfants servent l'Église était une sorte de promotion. »

 

La psallette

« J'arrive à la psallette de la cathédrale du Mans en octobre 1951. On était aux alentours de quarante élèves. Il y avait un professeur qui s'appelait Georges Blin. Il était là depuis 1934. Ce n'était pas une pension très riche. Les parents donnaient des produits pour les repas des enfants. Ceux qui étaient riches donnaient des bonnes choses, et les fils de paysans comme moi n'apportaient pas grand-chose. Nous étions dans le fond du réfectoire, et on était les derniers servis.

 

La Cathédrale du Mans sur une vieille carte postale© DR

« C'était une vie d'étude assez rude. On se levait vers 6 heures le matin pour aller dans une cathédrale très froide. Celle du Mans est très belle, mais glaciale pour un gosse qui sort de son lit. On assistait ou on servait une messe. Après il y avait le petit-déjeuner et on filait aux études. Le chant, l'apprentissage du solfège et de l'harmonium, faisaient partie intégrante du cursus.

 

« Outre la vie scolaire, qui se déroulait selon un rythme habituel, il y avait la vie de loisirs des gamins. Les récréations, des films sur les saints. Et beaucoup de péplums. Cela chahutait un peu le gamin que j'étais, car dans ma famille tout ce qui avait trait à la nudité était caché. Insidieusement on nous faisait découvrir le corps de l'homme par une série de films sur les héros chrétiens qui se battaient quasi dénudés contre les lions au temps de César ou de Néron. Pour des gamins de huit-dix ans, surtout lorsqu'ils vivent en vase clos, cela travaille un petit peu... En plus, le confesseur nous faisait réfléchir sur le péché, revenant souvent sur ceux de la chair. Ce faisant chez un gamin qui devient progressivement adulte, il éveillait un questionnement intérieur. »

  • Il me disait: « Si tu fais cela, tu en auras une belle comme moi. »

Dans les années 1950, en Mayenne, l'autorité de l'Église pesait encore de tout son poids dans la société. C'était une période pré-Vatican II, d'avant les prêtres-ouvriers ou du message social de l'abbé Pierre. Son pouvoir temporel se confondait avec le spirituel. Personne ne mettait son nez dans ses affaires. Les enfants n'étaient pas tout à fait des personnes. L'Église les accueillait ou les recueillait pour en faire de bons catholiques, mais ne se souciait pas vraiment de ce qui leur arrivait entre les mains de ceux chargés de leur éducation.

 

Le père Blin

« Les choses ont commencé à basculer en 1952. Plusieurs d'entre nous ont été choisis par le père Blin pour apprendre et réciter la messe en latin. Nous étions très fiers d'être sélectionnés pour cela. C'était un petit jeu de déguisement, nous étions habillés de vêtements liturgiques et nous manipulions des objets cultuels miniatures. Cela se passait généralement pendant que les autres étaient partis en promenade dans un bois autour du Mans. On avait donc toute une après-midi avec lui.

« J'étais un enfant assez sensible. Je voyais mon tuteur, mon oncle Julien Gouet, tous les jours, j'allais goûter chez lui à l'évêché du Mans. C'était quelqu'un d'accueillant, de sécurisant, mais d'un peu froid.  Comme j'avais perdu mon père, j'attendais plus d'affection. Le père Blin était plus chaleureux. Il savait se rendre paternel.

 

Le père Georges Blin, en 1953© DR

« Un jour, on avait fini les exercices religieux. Tour à tour il nous faisait rentrer dans son bureau pour bavarder. Il me prenait sur ses genoux, puis me caressait un petit peu la tête. Ce jour en particulier, ce n'était pas très agréable. J'ai senti quelque chose qui m'interpellait un petit peu. Il avait une érection... Je n'en ai pas fait cas sur le coup, mais je me disais que mon papa, lorsqu'il était vivant, il n'avait pas cela. Il en a profité pour me dire: « Je vais te confesser. » Là, il a sorti son attirail pour que je lui fasse une fellation.

« C'était assez pervers, car il me disait: “Si tu fais cela, tu en auras une belle comme moi.” Je m'y suis plié et soumis. Il avait de l'autorité. Quand on voyait le bonhomme, ce n'était pas un rigolo. Après, il m'a dit: “Je vais te confesser. Et à chaque fois que l'on fera cela, je te confesserai et je te pardonnerai.

« Ça m'a complètement perturbé ce truc de consommation sexuelle et de confession. C'est devenu un rituel pendant quelques mois. C'était surtout pendant les études du soir que j'étais appelé en confession. J'étais dans ma traduction de grec ou de latin et puis on me disait “Gouet, vous êtes appelé en confession.” Il fallait sortir du bâtiment et monter à l'étage chez le père Blin. Les battements de cœur étaient assez forts. Cela me gênait, tout en me procurant une espèce d'éveil de l'érotisme qui me subjuguait. Cela m'éveillait à des choses interdites. Au début, c'était une fois par semaine. Et puis ensuite, parce qu'il y a pris goût, c'était deux ou trois fois par semaine. Il y a eu des périodes où il se calmait, puis ça revenait. »

 

Jeunesse brisée

« Ça a duré de 1952 à 53. Ça m'a bousillé complètement ma jeunesse. J'avais perdu tous mes repères. Je pouvais faire n'importe quoi et j'étais toujours pardonné. Je faisais donc toutes les conneries. La confession et les sacrements étaient devenus une vaste galéjade. On me disait: “Il faut être pur pour communier.” J'étais pur, certes, mais je recommençais trois jours après à faire une fellation à mon confesseur. La confession était, pour ces prêtres, une alimentation de leur érotisme et de leurs fantasmes. Ils avaient l'art et la façon pour tirer les vers du nez à des gamins et des gamines, et repérer les plus faibles.

 

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11 août 2010 3 11 /08 /août /2010 11:50

10 Août 2010

Par Thomas Cantaloube

C'est une histoire qui n'a pas été facile à raconter. Enfouie pendant des années, des décennies, au plus profond de son corps et de ses souvenirs. Il aura fallu que les affaires de pédophilie dans l'Église resurgissent, une fois de plus, au mois de mars 2010, et que Benoît XVI renâcle à les reconnaître et à s'en excuser, pour que Pierre Gouet décide de se confier. Abonné et lecteur fidèle de Mediapart, il a envoyé un email faisant part de son désir de parler, après une semaine de nuits sans sommeil. Pour raconter son histoire, à la fois emblématique et unique. Emblématique, parce que des gamins victimes de violeurs en soutanes, dans les années 1950, il y en a probablement eu des milliers rien qu'en France. Unique, parce que son contexte familial lui a fourni un point d'observation privilégié sur le fonctionnement de l'Église et sur ses connivences avec une partie de la droite française.

Il y a beaucoup de blancs dans l'enregistrement du témoignage de Pierre Gouet. Des hésitations, mais aussi de l'émotion contenue. Une douleur longtemps ravalée. Nous avons choisi de vous présenter son récit, en deux parties, de manière brute et extensive.

Pierre Gouet, le 10 juin 2010© Thomas Cantaloube

 

Origines

« Je suis un fils de paysan originaire de la Sarthe. Mon père a été prisonnier de guerre, déporté, et il est mort des suites de captivité en 1951. J'avais sept ans et demi. Le conseil de tutelle, présidé par mon oncle Julien Gouet, qui était vicaire général du cardinal Grente, a dit qu'il fallait que j'aille en pension. J'ai donc été envoyé à la psallette de la cathédrale du Mans.

« Ma mère était vivante, mère de huit enfants et vivait dans une petite ferme. Pour elle, c'était une certaine libération, même si j'ai su plus tard que c'était très dur pour elle de se voir dépouiller de ses enfants.

« Je suis rentré à la psallette en octobre 1951. C'était très difficile. J'étais un gamin complètement perdu. Mon frère, qui avait dix ans de plus que moi, était séminariste au Grand Séminaire du Mans. Pour la petite histoire, il a été surveillant de François Fillon à Saint-Michel-des-Perrais. Il était très turbulent... J'avais un autre oncle jésuite. Pour mon grand-père, le fait que ses enfants servent l'Église était une sorte de promotion. »

 

La psallette

« J'arrive à la psallette de la cathédrale du Mans en octobre 1951. On était aux alentours de quarante élèves. Il y avait un professeur qui s'appelait Georges Blin. Il était là depuis 1934. Ce n'était pas une pension très riche. Les parents donnaient des produits pour les repas des enfants. Ceux qui étaient riches donnaient des bonnes choses, et les fils de paysans comme moi n'apportaient pas grand-chose. Nous étions dans le fond du réfectoire, et on était les derniers servis.

 

La Cathédrale du Mans sur une vieille carte postale© DR

« C'était une vie d'étude assez rude. On se levait vers 6 heures le matin pour aller dans une cathédrale très froide. Celle du Mans est très belle, mais glaciale pour un gosse qui sort de son lit. On assistait ou on servait une messe. Après il y avait le petit-déjeuner et on filait aux études. Le chant, l'apprentissage du solfège et de l'harmonium, faisaient partie intégrante du cursus.

 

« Outre la vie scolaire, qui se déroulait selon un rythme habituel, il y avait la vie de loisirs des gamins. Les récréations, des films sur les saints. Et beaucoup de péplums. Cela chahutait un peu le gamin que j'étais, car dans ma famille tout ce qui avait trait à la nudité était caché. Insidieusement on nous faisait découvrir le corps de l'homme par une série de films sur les héros chrétiens qui se battaient quasi dénudés contre les lions au temps de César ou de Néron. Pour des gamins de huit-dix ans, surtout lorsqu'ils vivent en vase clos, cela travaille un petit peu... En plus, le confesseur nous faisait réfléchir sur le péché, revenant souvent sur ceux de la chair. Ce faisant chez un gamin qui devient progressivement adulte, il éveillait un questionnement intérieur. »

 

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17 juillet 2010 6 17 /07 /juillet /2010 18:49
Le mensonge de Luc Chatel

 

Halte aux contre-vérité diffusées par la presse dans l'affaire Bettencourt, martèlent les ministres ! Le gouvernement est en droit de demander aux journalistes de respecter scrupuleusement les faits. Mais respecte-t-il lui-même les faits quand il communique sur son action ? Donne-t-il l'exemple ? Hélas, non !

 

Un seul exemple, récent. Il est établi que c'est Alain Joyandet qui a voulu quitter le gouvernement dimanche dernier, contre le souhait de Nicolas Sarkozy : sur ce point, tous les organes de presse sont d'accord, « de Mediapart » au « Figaro ». Comment le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel, a-t-il présenté l'épisode ? Le président et le Premier ministre ont demandé à Alain Joyandet (et à Christian Blanc) de démissionner. Soit une parfaite contre-vérité.

 

Luc Chatel avait le choix : soit respecter les citoyens (et contribuables) français, en évitant de leur raconter des salades. Soit protéger l'ego de Sarkozy : notre hyperprésident entend tout décider, tout contrôler, un vulgaire Joyandet ne saurait donc lui avoir imposé sa volonté. Luc Chatel a choisi le service de Sarkozy contre le respect des faits et des Français. Dans ces conditions, le gouvernement est mal placé pour faire la leçon aux journalistes : même s'il arrive effectivement à certains d'entre eux, parfois, de déraper.

 

Source.

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16 juillet 2010 5 16 /07 /juillet /2010 17:58

 

De ce qui fût un sordide conflit familial destiné à faire les premières pages des magazines "people", on en est venu à un entrelacs mêlant le président de la République, deux ministres, un procureur, une présidente de chambre correctionnelle, des journalistes, des soupçons de fraude fiscale et de financements frauduleux de la campagne présidentielle.

 Voici qu'un homme est contraint de se justifier, sa femme de démissionner de ses fonctions, les journalistes accusés de méthodes fascistes. Disons-le tout de go : au-delà de la liberté d'informer, du devoir d'informer, qui est l'essence même de la liberté de la presse, on ressentira toujours un malaise face au déferlement d'accusations qui acculent les uns et les autres jusqu'à faire du jeu normal des questions-réponses une forme de tribunal public.

A coup sûr, s'il y a quelque chose de salutaire à ce que les faits puissent être débattus, un récent sondage montre que c'est bien la politique et sa forme représentative qui sont doublement ébranlées. Sa capacité à changer l'état des choses était déjà atteinte, c'est maintenant sa capacité à disjoindre l'intérêt général des intérêts privés qui est mise en cause.

On peut s'en prendre à la presse, accusée de ronger jusqu'à l'os la nourriture qu'on lui a servie. C'est ignorer qu'elle est dans son rôle dans la recherche de l'information, quitte à répondre de ses éventuels abus devant les tribunaux. C'est surtout ignorer la main qui a dispensé cette nourriture.

Pour être ancienne, l'image reste toujours d'actualité : César doit être insoupçonnable. Or de l'apparence à la réalité, Nicolas Sarkozy a donné au soupçon la forme du réel. César d'abord, lorsqu'il fait de l'exercice de son mandat une sorte de finale permanente entre lui et la France, voire le reste du monde. Rien ne lui échappe, ce qui veut dire aussi que nul n'est à l'abri, parfois au mépris des règles de la République, de sa volonté. De cette empreinte permanente sur toute chose, naît le soupçon d'être d'une autre caste et de la servir. Ce que l'apparence atteste dès le début du mandat en conjuguant Fouqet's, yacht et séjour aux USA. Ce que la loi concrétise par des mesures sociales et fiscales qui justifient publiquement les inégalités insupportables qui rongent notre société.

NICOLAS SARKOZY A ÉCHOUÉ À CONSTRUIRE UNE RÉPUBLIQUE IRRÉPROCHABLE

Tout embrasser, c'est aussi ramasser les pouvoirs des institutions sous son contrôle au travers de nominations ad hoc (que d'autres nominations ou quelques prébendes ne suffisent pas à compenser) ou de réformes institutionnelles faisant de l'Etat, de ses rouages et de ses serviteurs les relais d'une fidélité bien peu républicaine à un homme et sa politique.

C'est jusqu'à la fraternité, cette huile sans laquelle la liberté et l'égalité peuvent tourner à vide, que va le délitement quand la xénophobie d'Etat tient lieu de politique et s'étend de proche en proche à ceux et celles dont l'identité n'est supportable qu'à dose modérée, la quantité d'une certaine catégorie de français semblant la source de nos maux.

Non seulement Nicolas Sarkozy a échoué à construire une République irréprochable mais il en a défait les tenons qui permettaient d'assurer l'articulation des institutions et qui permettaient à chacun, même en désaccord, de s'y sentir reconnu.

Dans la violence des affrontements d'aujourd'hui, c'est tout cela qui affleure. On peut répondre à ces affrontements, à ces soupçons, par le déni ou l'insulte. On peut crier à la manœuvre politique. Nul ne sait comment se poursuivra un feuilleton qui apporte chaque jour son lot de révélations.

Mais, s'il reste une parcelle de bon sens à ceux qui nous gouvernent, s'ils sont encore en mesure de comprendre ce que peut avoir de mortelle la plus petite ambiguïté, revenons-en à un fonctionnement normal de la République. Qu'une information judiciaire soit ouverte et qu'un juge d'instruction soit chargé d'enquêter sur la totalité de ces évènements. C'est la seule méthode pour quitter l'ère du soupçon et préserver notre démocratie.

Michel Tubiana, président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme
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